
Donnant par la même occasion le coup d’envoi de ce portail ISS News, Thomas Pesquet s’était envolé le 23 avril 2021 vers la Station spatiale internationale à bord d’une capsule Crew Dragon de SpaceX, en compagnie de trois astronautes américains.
Le 19 janvier dernier, devant les membres de l’AJPAE (Association des Journalistes Professionnels de l’Aéronautique et de l’Espace), l’astronaute français a détaillé sa mission, que nous vous présentons sous forme de série chaque semaine.
Aujourd’hui, dernier épisode : retour sur Terre.

Un rendez-vous manqué
Thomas Pesquet : « Parlons du retour sur Terre, qui est intervenu après exactement 199 jours, 17 heures et 44 minutes ; on va dire 200 jours, en gros. 200 journées de mission.
C’était un peu sportif parce qu’on a essayé de se coordonner avec la mission Crew 3, où se trouvait Matthias [Maurer].
On voulait que nos deux séjours se chevauchent : on aurait été contents à l’Agence spatiale européenne d’avoir deux Européens en même temps à bord de l’ISS, même si c’était juste pour quelques jours.
Mais au final, ça ne s’est pas passé comme cela : Crew 3 devait tirer le 1er novembre mais a été retardé deux fois. La question s’est alors posée de savoir si nous allions arriver, non pas en bout de vie mais presque : le Crew Dragon est certifié pour reste 210 jours en orbite ; au-delà, il faut regarder.
Il nous restait un peu de marge, mais on commençait à arriver vers la fin. Si Crew 3 était encore retardé, si la météo n’était pas bonne pour le lancement, mais aussi pour le retour, qu’est-ce cela allait donner ? Etc. Avec cette météo capricieuse, la décision a été prise de découpler les deux événements. On a eu une bonne fenêtre météo et on a donc dit :Go, on y va ! »
Tour du propriétaire

Thomas Pesquet : « On est partis le 8 novembre. Juste après s’être séparés de la station, on a fait un fly around autour, ce qui n’avait pas été fait depuis la navette.
La navette, c’est super manœuvrant. Ça se pilote très-très bien, plus qu’un Soyouz. Du coup, après s’être désarrimée, elle faisait toujours un petit tour de l’ISS, à 150-200 mètres de distance, pour l’inspecter. Les gars prenaient des photos dans tous les sens, ensuite ils faisaient leur rentrée atmosphérique et leur descente.
On n’a plus fait ça depuis 2011. Il y a bien eu Paolo Nespoli qui a fait des photos de la station avec la navette amarrée, mais c’était compliqué, le Soyouz ayant une petite fenêtre seulement de chaque côté ; et en scaphandre et avec des longues focales, c’était presque mission impossible.
Là, on a eu l’occasion de le refaire : j’ai fait 2 000 photos pendant le fly around !
Les fenêtres sur le Crew Dragon ne sont pas géniales optiquement, car il y a beaucoup de protections et différentes couches de verre. Cela fait qu’on ne peut pas prendre malheureusement des photos très zoomées sans qu’elles soient un peu floues.
On est quand même arrivé à en faire quelque chose, et il y a des photos sympas qui sont sorties. Surtout, le but c’était d’observer l’extérieur de la station, pour les ingénieurs au sol. »
La rentrée dans l’atmosphère


Thomas Pesquet : « Au sujet de la rentrée atmosphérique, rien de spécial à signaler, ça a très bien marché.
Encore un peu un son et lumière car il y a de grandes fenêtres dans le Crew Dragon. C’était assez marrant le freinage, avec le bouclier thermique qui brûle petit à petit en fait. Le plasma, les gaz ionisés par la chaleur autour de nous qui deviennent tout roses : comme l’intérieur de la cabine est complètement blanc, tout devenait complètement rose, c’est assez sympa, même si on était écrasés sous 4 g. C’était rigolo, plutôt relaxant.
L’amerrissage a eu lieu dans le Golfe du Mexique, au large de Pensacola, de l’autre côté de la Floride – pas le côté Atlantique, on va dire.
La récupération s’est très bien passée. Les bateaux nous ont rejoint tout de suite.On est sortis de la capsule, on a été ramenés en hélicoptère vers la côte, puis directement emmenés vers Houston, où mes collègues sont restés avec Aki. Moi, j’ai été rapatrié par l’Armée de l’Air française à Cologne. »
La mission continue
Thomas Pesquet : « Mais la mission ne s’arrête pas là : il y a ensuite les debriefings, des expériences post-vol à effectuer, etc., etc., qui m’ont amené jusqu’à maintenant [mi-janvier 2022], et ce n’est toujours pas fini…
J’ai eu quand même un peu de vacances pour Noël et les fêtes de fin d’année.
Je termine avec cette belle photo de la Lune ; je ne sais plus si c’est moi qui l’ai prise, mais c’est pour vous dire que la suite, c’est ça… »
Retranscription de Stéphane Sebile
Retrouvez l’épisode 9 : Vue sur la Terre