
Parmi les expériences physiologiques réalisées à bord de la Station spatiale internationale par l’astronaute allemand Matthias Maurer se trouve Myotones (Muscle Tones in Space – Tonus musculaire dans l’espace). Cette étude permet d’étudier l’impact de la micropesanteur sur les propriétés biomécaniques des muscles, des tendons et des fascias, ainsi que la tonicité musculaire et l’effet des exercices physiques réalisés à bord de l’ISS durant les missions de longue durée (six mois).
Un exemple de coopération dans la durée
Myotones est le fruit d’une collaboration internationale impliquant l’Agence spatiale européenne (ESA) et plus particulièrement l’Agence spatiale allemande (DLR), le CNES et l’Agence spatiale britannique (UKSA).
L’appareil utilisé par Matthias Maurer a tout d’abord été envoyé à bord de l’ISS grâce à une capsule Dragon de Space X (CRS-14) lancée en avril 2018. Alexander Gerst a ensuite été le premier astronaute européen à utiliser cet appareil de la taille d’un téléphone portable lors de sa deuxième mission « Horizons » à bord de l’ISS. Depuis, plusieurs membres d’équipage des Expeditions 56 à 66 se sont prêtés à cette étude.

Un appareil novateur mais exigeant
Il a longtemps été difficile d’étudier l’impact structurel au niveau musculaire de l’absence de pesanteur durant une mission spatiale. Certains astronautes ont subi des biopsies musculaires, mais cette méthode très douloureuse était difficilement reproductible sur plusieurs sites et de manière répétée. Il est par ailleurs d’usage de ne les réaliser qu’avant et après le vol.
Grâce à l’appareil Myotones, des mesures sont réalisées avant, pendant et après le vol. L’envoi d’une vibration au contact de la peau permet de mesurer différentes caractéristiques musculaires (élasticité, raideur, tonicité). Il permet de mesurer de manière objective l’état d’un muscle, rapidement et facilement et surtout de manière non-invasive (non douloureuse). Les mesures sont réalisées de manière couplée à une imagerie par ultra-sons grâce à un échographe. Les points de mesure (muscles, tendons, fascias) sont repérés de manière précise au sol, puis référencé afin de positionner l’appareil de manière reproductible sur des zones du dos, du bras, des jambes et des pieds.
L’aide d’un second expérimentateur est indispensable puisque l’appareil Myotones doit être utilisé sur un astronaute au repos, dans un état de relaxation complet et à distance des exercices physiques pratiqués quasi quotidiennement dans l’ISS. Les mesures doivent par ailleurs se réaliser à température constante tout au long de l’expérience qui est répétée plusieurs fois pendant le vol.
Des applications spatiales et terrestres
Si l’étude Myotones, par ses nombreuses données recueillies, permettra d’étudier et donc de préparer au mieux les astronautes pour les voyages lointains dans l’espace, elle a également des applications possibles pour beaucoup de patients sur terre. En effet, toutes les maladies touchant les muscles pourraient tirer bénéfice de cette expérimentation : dystrophie musculaire, paralysie cérébrale infantile, réhabilitation musculaire dans le cadre de pathologie neurodégénérative comme la maladie de Parkinson, conséquences d’alitement prolongé, accident vasculaire cérébrale… Elle peut permettre également le suivi musculaire des sportifs de hauts niveaux avec ou sans blessures.
Docteur Guélove Nolevaux